Il reste toujours beaucoup à apprendre sur la cognition* et le comportement équin d’un point de vue scientifique. Cette revue explore l’état actuel de la recherche sur 3 sujets liés à cette cognition : les interactions homme/cheval, l’apprentissage social et autonome (« auto-dirigé »). Nous vous proposons un résumé de ces recherches, ainsi que des pistes de recherche pour la suite.
Conclusions Finales
Cette recherche soutient l’idée qu’un répertoire avancé et sophistiqué en communication a été sélectionné chez les espèces sociales, en réponses aux challenges auxquels ils font face dans un environnement social.
Mécanismes sous-jacents à la cognition sociale et à la communication
Dans les études évoquées précédemment, nous avons pu observer que les chevaux ont également des comportements miroirs (et multimodaux) face à des expressions faciales ou des vocalisations à portée émotionnelle. Les différentes études évoquées font pencher la balance vers la présence de neurones miroirs multimodaux chez le cheval, car capables d’adapter leur expression faciale émotionnelle à celle perçue (et donc d’avoir un possible transfert émotionnel, pour le moment non démontré formellement). Il est toutefois possible que ces réactions soient liées à un apprentissage.
Les chevaux sont capables de faire une distinction entre différentes émotions suite à des expressions faciales
Les résultats démontrent que les chevaux sont capables de reconnaître et de distinguer les expressions faciales émotionnelles de manière pertinente, dans le cas présent entre des expressions positives et négatives. Ceci prouve donc qu’en face d’un congénère inconnu, cette compétence permet au cheval d’augmenter les opportunités d’interactions « positives » et réduit les risques de conflit.
Les yeux et oreilles sont des indicateurs visuels de l’attention chez le cheval domestique
Les chevaux sont sensibles à l’état d’attention d’un congénère, et sont donc capables de reconnaître leur capacité à sentir l’attention d’un prédateur sur eux ayant déjà été démontrée. Dans l’étude, les chevaux ont été capables de prendre des décisions alimentaires selon l’attention, ou non, du stimuli : les informations transmises par les yeux ainsi que les oreilles sont capitales dans la compréhension de leur environnement.
Le transfert des informations émotionelles chez le cheval
Cette représentation audiomotrice est particulièrement étudié chez l’Homme : lorsque nous adoptons des postures émotionnelles/expressions faciales, nous avons tendance à ressentir l’émotion associée. Cette cohérence d’état émotionnelle, ainsi que sa transmission/contagion, est un autre mécanisme crucial pour la compréhension des émotions/état intérieurs d’autres humains, et permet la mise en place de comportements sociaux complexes tels que l’empathie et l’altruisme.
La méthode de travail EquiFACT
Chaque action faciale est définie comme une « unité d’action (UA) », au nombre de 17 (par comparaison l’Homme en compte 27, alors que le chimpanzés 13 et le chien 16). Cette méthode permet de comparer à travers des espèces les moyens, fonctions et évolutions du comportement de communication.
Le leadership est-il un concept fiable chez le Cheval ?
Les récentes recherches soulignent que l’existence de processus distribués entre les individus semble être la norme pour les mouvements de groupe chez les animaux, et que la prise de décision a lieu avant et après le départ. Le leadership concentré sur un seul individu apparait donc comme un cas extrême parmi le continuum des processus de prises de décision qui s’étend depuis le contrôle par un seul individu jusqu’à un partage égal des décisions entre les membres d’un groupe.
Les henissements chez le cheval : éveil émotionnel et valence
Comprendre le corrélat vocal des émotions est crucial afin de mieux comprendre l’expression des émotions chez le cheval. Nous vous proposons aujourd’hui une étude portant sur ce sujet, et qui prend en compte deux dimensions des émotions chez les chevaux : l’éveil émotionnel et la valence.
L’apprentissage associatif
Après avoir détaillé les mécanismes de l’apprentissage non-associatif, attardons-nous davantage au mode associatif. Dans ce mode d’apprentissage, le conditionnement opérant domine. En voilà les grandes caractéristiques.
Traditionnellement, le mode d’apprentissage le plus courant est le conditionnement opérant ou instrumental. Avec cette méthode, le cheval réalise une action de manière volontaire suite à un conditionnement. Par exemple : le cheval accélère lorsque la cravache est levée derrière lui car il veut éviter la douleur qu’il a associée à cet outil lors d’une expérience antérieure. L’anticipation de la douleur suffit donc à le faire réagir. Pour plus de subtilité, il est ensuite possible de combiner des actions, par exemple l’action de la jambe du cavalier suivie de la cravache levée, associée à la mise en avant. Le cheval sera alors conditionné à répondre à l’action de la jambe uniquement. Il faudra par la suite supprimer l’action de la cravache. A ce moment-là, la jambe du cavalier sera devenue un stimulus conditionné secondaire. Le conditionnement opérant va évidemment bien plus loin dans l’aboutissement du dressage du cheval : report de poids, jambe placée à tel ou tel endroit, actions des rênes, … Les demandes peuvent dont devenir de plus en plus subtiles au fil de l’apprentissage.
Un autre grand principe d’éducation est le renforcement. Ce dernier peut être positif ou négatif. La compréhension du renforcement est un élément clé dans l’apprentissage. Pour résumer, s’il est négatif, le cheval est confronté à quelque chose de désagréable, s’il est positif, le cheval est récompensé pour son action. L’éthologue Marthe Kiley-Worthington considère que la meilleure méthode d’apprentissage est d’allier les deux types de renforcement.
Concernant le renforcement, qu’il soit positif ou négatif, le timing est très important. Un timing non adéquat pourrait apprendre au cheval à ruer alors qu’on voulait lui enseigner à donner les pieds par exemple. Notons également que renforcement négatif et punition sont très différents. Le renforcement négatif est le fait de supprimer une stimulation (la pression sur la longe par exemple) quand le cheval donne la bonne réponse. Ce renforcement intervient donc à la seconde où l’animal donne la réponse, alors que la punition intervient après une “mauvaise” réponse.
Pour plus de détails quant au renforcement positif, nous vous invitons à consulter la partie suivante de ce dossier. Cette dernière est exclusivement consacrée au clicker training.
Nous ne rappellerons jamais assez que la clé d’un apprentissage durable et efficace reste généralement une relation de confiance entre le cheval et son humain. C’est face à un cheval motivé et épanoui que les résultats se font le plus rapidement.
Gaëlle Colinet
La troisième partie de ce dossier concernera le clicker training.
Sources :
- Marthe Kiley-Worthington, « Le comportement des chevaux », Paris, Zulma, 2013
- Maria Franchini, « De l’intelligence des chevaux – Une exploration de leur vie mentale et émotionnelle », Paris, Zulma, 2009
- Véronique de Saint Vaulry, « Communiquer avec son cheval », Paris, Vigot, 2010
- Leblanc, Bouissou, Chéhu, « Cheval qui es-tu ? », Paris, Belin, 2004