Le stress module les performances d’un apprentissage instrumental en interaction avec le tempérament chez les chevaux
Cet article est la partie 2 de 5 du dossier Tempérament et apprentissage

Principe de l’expérimentation

Afin d’évaluer l’influence du stress, les chevaux ont été exposés à un stress aigu juste avant ou juste après l’acquisition de la tâche cognitive.

Le cheval est placé face à 2 cônes de signalisation derrière lesquels est assis l’expérimentateur. La tâche cognitive consiste à toucher le cône montré du doigt par l’expérimentateur afin de recevoir une récompense alimentaire. Chaque cheval est testé 2 fois : le jour de l’acquisition de la tâche cognitive puis une semaine après (phase de réacquisition).

Trois groupes de chevaux ont été constitués :

  • S1 : groupe stressé avant l’acquisition (n = 15)
  • S2 : groupe stressé après l’acquisition (n = 15)
  • NS : groupe non stressé (n = 19)

Le stress aigu correspond à 20 événements soudains et imprévisibles toutes les 30 à 90 secondes (sons bruyants, stimulations sensorielles aversives, mouvements soudains, introductions d’objets inconnus). Voici le schéma du protocole expérimental :

Protocole expérimental

Voici les différentes mesures réalisées sur les chevaux :

  • mesure du tempérament : réactivité à l’humain, sensibilité tactile, nouvel objet (peur), isolation sociale (grégarité), nouvel environnement (peur), test de surprise (peur), activité locomotrice. La mesure des différentes modalités de tempérament a été réalisée avant la tâche cognitive.
  • mesure du cortisol salivaire (stress)
  • observations comportementales : exploration des cônes de signalisation, grognements, hennissements, soufflements et postures d’alerte pour chaque session d’apprentissage.

Résultats

Effet du stress sur les performances d’apprentissage

Apprentissage de Bahia

L’état de stress des chevaux pourrait les rendre plus actifs au début de la session d’acquisition.

Au début de l’apprentissage (premier tiers-temps), les S1 montrent les meilleurs résultats, suggérant un effet positif du stress sur les performances. L’état de stress des chevaux (mis en évidence par des concentrations salivaires de cortisol supérieures à celles des autres groupes) pourrait les rendre plus actifs au début de la session d’acquisition. Ils seraient ainsi plus enclins à toucher les cônes. Cependant cet effet est temporaire puisque l’on n’observe plus de différence entre les 3 groupes pendant les 2 tiers-temps suivants.

Au contraire, le stress semble altérer le processus de réacquisition. Alors que le groupe NS a amélioré ses performances entre la session d’acquisition et la session de réacquisition, les groupes S1 et S2 n’ont montré aucune amélioration. L’état de stress des chevaux S1 et S2 a été mis en évidence par des indicateurs physiologiques (concentrations salivaires de cortisol élevées) et comportementaux (plus grand nombre de postures d’alerte). Les auteurs font donc l’hypothèse que les chevaux S1 et S2 ont associé le stress au contexte de l’apprentissage. Ainsi, quand ils sont replacés 7 jours plus tard dans le même contexte, cette association pourrait induire un état de stress qui nuit à la réacquisition de la tâche. De plus, cet état de stress pourrait avoir détourné l’attention des chevaux de la tâche cognitive et ainsi détériorer les performances de réacquisition. Enfin, il est intéressant de noter que l’effet du stress est plus fort chez les S2 que chez les S1. Ainsi, un même facteur de stress est plus délétère pour les performances futures quand il a lieu après l’acquisition, plutôt qu’avant.

Effet du tempérament sur les performances d’apprentissage

Apprentissage de Cherokee

Les résultats montrent que le tempérament amplifie l’effet du stress.

Les résultats montrent que le tempérament amplifie l’effet du stress.

Pendant la session d’acquisition, il n’y a pas de corrélation entre le tempérament et les performances d’apprentissage pour les chevaux non stressés avant la tâche (S2 et NS). Les chevaux S1 qui ont montré les meilleures performances sont ceux qui montraient les activités locomotrices les plus élevées (c’est-à-dire les plus peureux).

Pendant la session de réacquisition, on observe la même corrélation pour les chevaux S1 : les chevaux les plus actifs (donc les plus peureux) sont ceux qui présentent les meilleures performances. Ainsi, comme pour l’acquisition, un stress est plus délétère pour la réacquisition d’une tâche cognitive lorsqu’il est postérieur à l’apprentissage.

Comme précédemment, pour les groupes non stressés, il n’y a pas de corrélation entre le tempérament et les performances d’apprentissage.

Conclusion

  • Le stress détériore les capacités d’apprentissage des chevaux car il nuit à leur réacquisition. Il est particulièrement délétère lorsqu’il survient après la session d’apprentissage.
  • Le tempérament ne semble pas influencer les capacités d’apprentissage en situation non stressante. Par contre, une situation stressante révèle l’influence du tempérament et altère les capacités d’apprentissage de manière plus importante chez les chevaux peureux.
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2 commentaires

  1. Anne Auteur septembre 10, 2015 (7:23 )

    vraiment très intéressant!!!!!! Dans tous les domaines scientifiques ou moins (comme là) il faut publier même si c’est pour enfoncer des portes ouvertes!

  2. Aline Foury Auteur septembre 12, 2015 (4:13 )

    Merci ! C’est vrai que la science pose parfois des questions dont les réponses sont connues de manière intuitive. Mais elle permet de les démontrer par des arguments scientifiques et de pousser plus loin la réflexion. Cependant, je ne comprends pas en quoi cet article ne relève pas du domaine scientifique… Cette étude a pourtant été réalisée par des chercheurs de l’INRA et de l’IFCE et publiée dans une revue scientifique internationale Plos One !

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