Dossier rédigé par Alice Tollenaere, de l’ABSL Les Hippocampes
Le processus de conversion des os du cheval va en général de bas en haut. (Attention ceci dit de ne pas confondre la croissance en longueur, et celle en épaisseur). Ceci signifie que plus on s’approche du dos du cheval, plus la fusion des os se fait tard.
Calendrier de croissance
Le premier cartilage à s’ossifier, à la naissance, est la troisième phalange (os du pied). Dans l’ordre croissant viennent ensuite :
- Deuxième phalange – bas avant la naissance ; et haut entre 9 et 12 mois
- Première phalange – bas un peu avant la naissance ; et haut entre 13 et 15 mois
- Canon – haut un peu avant la naissance ; et bas vers 18 mois
- Petits os du genou – haut et bas entre 1.5 et 2.5 ans
- Portion porteuse du radius – entre 15 et 18 mois
- Bas du radius-ulna – entre 3 ans et 3.5 ans
- Humérus – bas entre 1.5 et 2 ans ; et haut entre 3 et 3.5 ans
- Omoplate – portion porteuse (bas) entre 3 et 3.5 ans
- Postérieurs – parties basses (phalanges et canon) identiques aux antérieurs ci-dessus.
- Jarret – cette articulation est « tardive » car placée assez « basse ». Les cartilages de croissance entre le tibia et le tarse ne fusionnent (s’ossifient) pas avant que le cheval n’ait 3 ans ou 3.5 ans (c’est pourquoi les jarrets sont connus comme étant un « point faible » et est même documenté comme tel dans la littérature du 18ème siècle !
- Tibia – bas entre 20 mois et 2 ans ; et haut entre 3 et 3.5 ans
- Fémur – haut et bas entre 3 et 4 ans
- Encolure – entre 2.5 ans et 3 ans
- Bassin – les cartilages de croissance des pointes de la hanche entre 1.5 et 2 ans mais le reste des os grandissent encore jusqu’à 5 ans et plus !
Et, vous l’aurez deviné, ce qui fusionne en dernier est la colonne vertébrale, pas avant 5 ans et demi et jusque 8 ans pour certains. Plus le cheval sera grand, plus il aura un long cou et donc plus longtemps il faudra pour que tous les cartilages ne s’ossifient. Un cheval normalement constitué a 54 vertèbres (7 cervicales, 18 dorsales, 6 lombaires, 5 sacrées, 15 à 18 coccygiennes) entre l’arrière du crâne et la pointe de la queue, et il y a plusieurs plaques de croissance dans chacune d’entre elles ! Et la colonne est d’autant plus fragile que, contrairement aux autres os du squelette, les plaques de croissance des vertèbres reçoivent le poids d’un cavalier (par exemple) parallèlement à elles et non perpendiculairement.
Autres faits intéressants : les dernières vertèbres à fusionner sont celles du garrot, à la base de l’encolure. Et la dentition d’un cheval n’est pas mature avant ses 6 ans !
Quand commencer le travail des jeunes chevaux ?
Avant de demander à un cheval de porter régulièrement un cavalier (ou tout autre poids) sans lui causer de dommages significatifs, il faut attendre qu’il soit mature, donc pas avant 5 ans et demi pour les plus précoces !
Que peut-il arriver de grave si on ne respecte pas ce timing ? D’abord, on peut provoquer des écrasements de certains cartilages pas encore fusionnés dans les membres. (Ceci dit, cela peut tout aussi bien se produire en cas de « simple » surpoids du cheval). On risque également d’abîmer le dos de notre monture. En effet, comme dit plus haut, le poids est supporté par les plaques de croissance des vertèbres de façon parallèle à celles-ci, ce qui risque fort de causer un « glissement » (ou déboîtement) de certaines vertèbres. Mais là encore, c’est peu fréquent avant 6 ans.
Un autre risque, nettement moins visible mais avec des implications tout aussi handicapantes, est encore d’un autre ordre. Le jeune cheval sait, par ressenti et par instinct, que porter un poids sur son dos le met en danger physiquement. En peu de temps, il saura exactement ce qu’est une selle et ce qu’implique le fait que vous montiez sur son dos. Et il vous aime et est plus sage que vous donc il va permettre cette situation. Mais il ne la permettra pas bêtement, à l’encontre de sa nature profonde qui est de survivre, donc lorsque vous mettrez le pied à l’étrier, il prendra des mesures pour se protéger. Exactement les mêmes que celles que vous prendriez pour anticiper l’arrivée d’un poids lourd sur votre dos : il raidi les muscles de sa ligne du dos, et pour l’aider à le faire, il devra aussi raidir ceux de ses jambes et retenir son souffle (raidir son diaphragme). Il est donc tout sauf détendu… Au plus tôt vous choisirez de monter votre cheval, au plus il prendra ces mesures (car il se sait physiquement incapable de porter le poids qu’il s’apprête à recevoir sur le dos), et plus souvent vous le monterez étant jeune, plus vous renforcerez la nécessité pour lui de répondre de la sorte dans cette situation.
Donc si vous faites partie de ceux qui confondent « débourrer » et « monter », ne commencez pas avant l’âge de 5 ans grand minimum ! Et posez-vous la question : « y a-t-il une quelconque raison pour laquelle je devrais monter ce cheval avant qu’il n’ait (minimum) 5 ans ? »…et répondez-y en votre âme et conscience.
Le travail d’acceptation (dont la monte n’est qu’une étape parmi tant d’autres) peut évidemment commencer plus tôt…mais ceci fera l’objet du prochain article !
3 commentaires
Merci pour ce bel article. On en apprend des choses !
Je viens de relire votre article … Je suis en pleine éducation de mon jeune.
J’y reviens avec plaisir pour me faire une piqûre de rappel…
La dernière partie de votre article est illustrée par les photos d’adonis.
Il est dommage de ne pas avoir presenter des photos dans des conditions identiques.
Sans harnachement, sans cavalier. Sur les photos où il est le plus jeune il est monté (ce que vous vous déconseillé en plus) et des esprits chagrins vous répondront que oui, la morfologie a changé mais que cela est sans doute rendu possible par le travail.
Il eut été fort intéressant d’avoir le même cheval, qui n’aurait jamais vu une selle, pros sous le même angle et dans les meme condition, pour démontrer votre hypothèse de travail 😉
Votre démonstration n’en aurait été que plus forte encore.
Je m’en vais continuer à lire vos articles.
Mon esprit étant perméable ces tes ci il a besoin de se rappeler du bon sens..
Tour à fait d’accord ! ! J’ai attendu que mon poulain arabe shagya fasse sa croissance sans brûler les étapes vis à v is de son débourrage . A 4 ans il m’a accepte sur son dos sans aucun problème et après je l’ai laissé tranquille
. Il a 6 ans aujourd’hui et son modèle est magnifique. Son squelette est robuste et harmonieux et son mental exceptionnel. Savoir attendre . Le laisser grandir. .. je suis comblée aujourd’hui